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LA PIE-GRIECHE ECORCHEUR
C'est un de ces petits vallons qui retentissent d'innombrables chants, le printemps venu. Une rivière, des prairies séparées par des haies de ronces, de vieux saules. En haut d'un buisson, le Bruant jaune chante, accompagnant la mélodie d'une Linotte. Au loin, le Coucou lance ses derniers appels : on est déjà fin mai !
Reste un oiseau, silencieux, qui observe le paysage du haut de sa branche. Il s'envole, attrape un insecte imprudent, puis revient, au même endroit. La Pie-grièche écorcheur est revenue depuis quelques jours déjà… On l'a tout de suite remarquée : de loin, une boule de plumes blanches. Aux jumelles, un magnifique oiseau, au masque noir, à la calotte gris-bleu qui tranche sur des ailes rousses. Même la Chevêche qui niche dans le vieux saule d'à côté, attraction habituelle des ornithologues qui passent par là, ne pèse pas lourd à côté de la Pie-grièche, décidément si fascinante.
Reste à repérer la femelle : ça y est : elle est quelques mètres plus loin, sur la même haie, à mi-hauteur. Madame est plus discrète : manteau brun, masque roux, calotte grise : de loin, on croyait voir des feuilles mortes. D'ailleurs, on ne la verra bientôt plus : il n'y a pas de temps à perdre, sitôt le nid construit, il faudra se mettre à couver. Rester enfermée quinze jours durant au milieu du roncier, dans un nid de mousses et de brindilles, pour veiller sur cinq ou six œufs.
Retour au même endroit, fin juin. La Chevêche, vexée que l'on ne s'intéresse plus à elle, boude sur son vieux saule. La Linotte continue ses sérénades, appuyées par le Bruant jaune. Les Pies-grièches, elles, n'ont guère le temps de chanter : il faut nourrir les cinq jeunes qui, déjà, sortent du nid et s'aventurent sur les branches du roncier. A l'affût, le mâle guette le moindre coléoptère imprudent, tandis que la femelle ramène pour ses petits, comble du luxe, un minuscule mulot. Puis elle repart. Et revient, un lucane dans le bec. Repart encore une fois, repère un premier insecte : celui-là, elle va le mettre en réserve, sur la clôture barbelée que le fermier du coin vient de poser… C'est vrai que nos Pies-grièches ont parfaitement compris le principe du garde-manger : on appelle ça des lardoirs, chez elles…
Bientôt mi-juillet, déjà. Les jeunes se sont envolés, et vont désormais de branche en branche, attendant que leurs parents apportent le repas. D'ailleurs, les parents en ont un peu assez : il est grand temps que les petits deviennent autonomes… Dans un mois, il faudra déjà songer à repartir vers l'Afrique. Et rendre enfin la vedette à la Chevêche du vieux saule…
Fiche signalétique
Pie-grièche écorcheur
Lanius collurio (Linné) Monotypique.
- Famille : - Strigidés
- Dimensions :
- Longueur : 17 cm - Envergure : 28 cm
- Poids :
- de 25 à 40 grammes
DETERMINATION
- Critères propres aux Laniidae :
- Passereaux d'assez grande taille, facilement observables lorsqu'ils chassent, à l'affût sur un buisson.
- Ils possèdent un bec fort permettant d'attraper de gros Coléoptères ou même de petits rongeurs, qu'ils empalent sur des lardoirs (généralement une épine ou un fil de fer barbelé).
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- Critères de reconnaissance de la Pie-grièche écourcheur :
- Plumage :
- Mâle en été : Dessus roux, ventre blanc cassé. Large masque noir, calotte gris-bleu. Queue noire, à bords blancs. Repérable de loin, à l'affût sur les plus hautes branches d'un arbre ou d'un buisson.
- Femelle : Ventre blanc, plumage globalement brun. Masque brun-roux, calotte grise ou brune. Elle se confond très facilement dans la végétation, et se montre moins que le mâle.
- Nid (aire) :
- Assez haut dans un buisson, difficilement repérable.
- Ponte :
- 5 œufs.
- La femelle couve pendant deux semaines environ.
- A une dizaine de jours, les jeunes s'écartent du nid, puis s'envolent quelques jours plus tard.
- La famille reste unie pendant un bon mois.
- Régime alimentaire :
- Insectivore : Coléoptères, Libellules… Parfois oisillons, mulots, baies.
- Chant :
- Rare, insignifiant, très peu audible.
- Le cri, plus fréquent, est un grincement bref, répété lorsque l'oiseau est inquiet.
- Migration :
- Migrateur.
- Dans le Nord de la France, les Pie-grièches écorcheur arrivent entre la fin avril et le début du mois de mai.
- Elles repartent dès la mi-août, et hivernent en Afrique centrale.
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Bibliographie
• Géroudet P. et Cuisin M., Les Passereraux d'Europe,T1, Delachaux et Niestlé
• Lefranc N. , Les Pies-grièches d'Europe, Delachaux et Niestlé
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Jean-Yves Barnagaud
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